La collection Léo et Léa

La méthode

Pourquoi une nouvelle pédagogie en G.S. de Maternelle ?

Avant de préciser une pédagogie pour l’Ecole Maternelle, il est utile de se poser quelques questions :

  Comment l’école maternelle répond-elle aux souhaits de l’enfant, conscients ou implicites, en sorte d’emporter son adhésion et sa coopération ?

  Comment l’enfant de trois ans devient-il un enfant de six ans, apte à la vie scolaire et prêt à réussir les apprentissages fondamentaux du C.P. dont, au premier chef, l’accès au langage écrit ?

  En quoi l’école maternelle est-elle « responsable » de l’adulte à venir, de son intelligence, de son agilité corporelle et de son efficacité, de son équilibre, de sa créativité ?

Pour pouvoir répondre à ces questions, il faut prendre en compte l’enfant de trois ans tel qu’il est quand il arrive à l’école maternelle.

L’enfant de trois ans

Il s’agit de le resituer sommairement dans son parcours vital et de prendre conscience de ce qu’il vit à cet âge.

Mis hors du cocon maternel et familial, petit et confronté au monde, aux autres, il a un intense besoin d’affirmer son identité en même temps qu’il doit construire sa relation sociale, deux nécessités qui lui semblent difficiles à concilier.

En conséquence, ce qui aura un sens pour l’enfant, c’est, d’une part, de se réaliser dans toutes les activités lui permettant d’affirmer son identité, de prendre confiance en lui ; c’est, d’autre part, d’être encouragé et aidé à se socialiser, grâce à l’adulte qui énonce clairement la règle à l’école et la fait respecter, tout en aidant l’enfant à gérer ses frustrations.

Le langage. Suite entre autres, au rapport de Bentolila sur la Maternelle, les programmes 2008 prennent enfin en compte le rôle primordial du langage.

Quels sont à notre avis les effets bénéfiques du langage ?

  Etablir une relation médiatisée, respectant l’intégrité physique de l’interlocuteur. C’est évidemment capital pour la socialisation. Très jeune, l’enfant doit apprendre à se servir du langage et non de l’agression physique pour avoir un impact sur autrui.

  Structurer la pensée. Préciser les idées, les ordonner, en les exprimant.

  Permettre l’abstraction : il y a de multiples rouges, mais il y a un concept de la couleur qui se nomme « le rouge », ou « du rouge ».

  Donner une chance égale pour accéder aux savoirs et à la culture : non seulement il est essentiel pour l’enfant d’avoir un langage structuré et étoffé pour pouvoir lire, mais le passage de l’oral à l’écrit sera facilité s’il a été initié et familiarisé oralement avec les formulations du langage écrit, plus variées, plus longues, plus précises.

  Donner l’amour des mots qui procurera la joie des lectures et par elles, l’accès à la culture, indispensable pour prendre du recul et pouvoir juger et gérer la réalité.

L’acquisition du langage

L’enfant fait un apprentissage intelligent du langage, à partir de celui que les adultes pratiquent auprès de lui. Après avoir exploré la production de tous les sons possibles, il va repérer et choisir ceux de la langue maternelle, et saisir les « mots » qui lui importent et qu’il articule très sommairement au début, puis de plus en plus précisément. Ce sont des « mots-phrases ». Vers deux ans, il saisit l’intérêt d’articuler deux mots de fonctions différentes (l’action et l’auteur de l’action, ou encore le personnage et son attribut…), et la phrase naît. Peu à peu, l’enfant repère chez l’adulte du vocabulaire et des constructions syntaxiques, dont il se saisit progressivement, en les perfectionnant par paliers grâce aux modèles fournis spontanément par l’adulte qu’il écoute.

A trois ans, cette construction du langage grâce à l’entourage familial et familier est en pleine activité. Il s’agit donc d’éviter que la séparation ne l’interrompe. L’enseignant doit entrer à son tour dans une relation langagière avec l’enfant, avec toute la délicatesse requise, pour que toutes les fonctions du langage puissent entrer en jeu.

L’intelligence

Certes, l’enfant, de trois à six ans, se développe spontanément.

Mais on sait actuellement que les potentialités de l’enfant sont bien plus larges que ce que l’adulte en réalise. On sait aussi que ces qualités qui peuvent paraître idéales, hétérogènes et résultant « de la chance » : l’intelligence, l’agilité, l’efficacité, l’équilibre psychique, les compétences en matière de communication, sont en réalité dépendantes les unes des autres et assez largement éducables.

  Entre trois et 6 ans, les acquis de la motricité, les acquis sensoriels et proprioceptifs, et les acquis de l’intelligence, sont peu dissociables.

  Les jeux corporels, adaptés et dosés – dont la pratique du chant – développent une confiance en soi nécessaire pour aller à la découverte du monde.

  Les jeux éducatifs, les activités de repérages spatiaux et temporels, permettent une meilleure adaptation au monde extérieur.

  L’enfant pourra acquérir à terme un développement plus poussé s’il a eu tout le temps nécessaire pour expérimenter très largement ses capacités corporelles et sensorimotrices et a pu longuement exercer son « intelligence manuelle » dans de multiples jeux « éducatifs » (constructions, empilements, équilibre, ordres croissants ou décroissants, etc.).

  L’intelligence se développe si elle est sollicitée, par le dialogue, par les activités, par l’écoute de textes.

  Les jeux de créativité et d’imagination, tout en permettant à l’enfant de vivre le temps d’enfance qui lui est très nécessaire, développent sa sensibilité, sa capacité d’initiative, son attention, sa maîtrise, sa capacité à faire silence, son intelligence.

Le rôle particulier de la Grande Section.

La conscience phonémique

Les phonèmes (ou sons identifiables qui constituent la trame de la parole) ont une valeur distinctive. Si l’on remplace dans un mot un phonème par un autre, il ne s’agit plus du même mot.

La Grande Section préparera donc efficacement l’acquisition de la lecture en amenant à la conscience de l’enfant les sons (phonèmes) qui constituent la parole et en reliant l’écoute du son, sa prononciation exacte et sa reconnaissance auditive, concomitamment avec la connaissance de la lettre qui le transcrit le plus communément, et qui permet de le symboliser. Ce programme peut être rempli grâce à des activités ludiques spécifiques et nouvelles. Voir le conte phonémique et ses dérivés Léo et Léa au pays des lettres qui parlent.

Soulignons encore que la reconnaissance du son n’est pas à confondre avec la reconnaissance de syllabes, puisque ce qui est en jeu est précisément la valeur distinctive du phonème, dans le mot comme dans la syllabe.

Le développement neuro-moteur et l’écriture.

La maturation neurologique qui conditionne les possibilités motrices est très loin d’être achevée à trois ans. La tonicité générale, la stabilité du tronc, l’indépendance et la coordination des gestes nécessaires à l’écriture (épaule, coude, poignet, main, doigts), évoluent jusqu’à 11/12 ans. Les travaux d’Ajurriaguera (neurologue) et de son équipe (psycho-motriciens, ré éducateurs de l’écriture) ont établi que la maturation neurologique de ses gestes fins n’intervient qu’à 5 ans et 9 mois en moyenne, et qu’il est vain et nocif de faire travailler la micrographie (l’écriture en 3 et 4 mm) avant que cette maturation ne soit intervenue. Le graphisme peut par contre être largement pratiqué en grand format. L’écriture peut donc être préparée et abordée, dans des conditions précises, adaptées à l’âge et à l’évolution de l’enfant.

C’est donc en tenant compte de l’enfant et de ce que nous apprennent les recherches et expérimentations en neurologie, en orthophonie, en psychologie analytique, qu’il importe de définir une nouvelle pédagogie qui concoure au développement de l’enfant et, en GS particulièrement, permette de le préparer efficacement aux apprentissages fondamentaux.

L’enseignant de l’école maternelle peut rencontrer des difficultés :

Avant trois ans, l’enfant a vécu. Son évolution antérieure a pu être entravée du fait des vicissitudes de la vie familiale, entraînant ce que l’on constate dans un certain nombre de cas : manque de langage, difficulté à s’adapter, instabilité psychomotrice, agressivité. L’école ne peut remplacer les parents et devra parfois faire appel à des professionnels extérieurs. Mais elle se doit de permettre à l’enfant les acquisitions auxquelles il n’a pu parvenir, afin de le mettre, dans toute la mesure du possible, sur un pied d’égalité avec les autres.